Depuis sa cellule, Marwan Barghouti, le plus important dirigeant palestinien du Fatah emprisonné en Israël, a fait en Mars 2012 une déclaration inhabituelle en appelant son peuple à entamer un soulèvement populaire contre Israël, à interrompre les négociations et à suspendre la coordination sécuritaire. Jérusalem ferait bien de l’écouter. Barghouti, qui purge cinq peines de prison à vie, est un des initiateurs de la deuxième Intifada. Avant que cette dernière n’éclate, il avait averti Israël qu’elle était imminente. A l’époque où il était encore un dirigeant épris de paix, populaire et non violent, Barghouti avait fait la tournée des partis sionistes israéliens et des faiseurs d’opinion pour les exhorter à conclure un accord avec les Palestiniens sous peine de voir éclater un nouveau soulèvement. Ses paroles étaient restées lettre morte et une terrible Intifada avait explosé. Barghouti y avait joué un rôle clé.
De sa cellule, Barghouti peut désormais observer le gel total des négociations et l’immobilisme d’Israël : les dossiers de l’occupation et de la paix ont disparu de l’agenda israélien. Et il appelle de nouveau son peuple à se soulever. On peut le comprendre. Si Israël avait voulu d’un accord avec les Palestiniens, il aurait dû libérer Barghouti, le dirigeant le plus authentique du Fatah. Israël a choisi de ne pas le libérer, pas même dans le cadre d’un échange de prisonniers. Quant à l’occupation, nous avons tendance à considérer que, si l’on n’en parle plus, elle n’existe plus. Cette approche pourrait bientôt nous exploser à la figure. En pensant que cette situation peut durer éternellement, le gouvernement nous mène vers un autre cycle de violence. Barghouti préconise aujourd’hui une opposition non violente et nous devrions l’écouter avant qu’il ne soit trop tard. Si un troisième soulèvement éclate, Israël ne pourra plus feindre la surprise. Barghouti nous aura avertis.
René Backmann écrivait dans le Nouvel Observateur, le 2 avril 2012 : « Celui que le pacifiste israélien Uri Avnery a baptisé « le nouveau Mandela » bénéficie en Palestine d’une popularité de héros national. Selon un sondage rendu public le 19 mars, il l’emporterait avec 64% des voix s’il était confronté, dans un scrutin présidentiel, au « Premier ministre » du Hamas, Ismaïl Haniyeh. Face au même adversaire, Mahmoud Abbas n’obtiendrait que 53% des suffrages. « Si Israël avait voulu un accord avec les Palestiniens, le gouvernement aurait libéré Barghouti, écrivait la semaine dernière l’éditorialiste de Haaretz. Il est le dirigeant le plus authentique que le Fatah ait produit et il pourrait conduire son peuple à un accord. Contrairement à ce que nous avons fait auparavant, nous devons l’écouter avant qu’il ne soit trop tard. Si un troisième soulèvement éclate, Israël ne pourra pas feindre la surprise. Barghouti nous a prévenus ».